Les Voies du Sacré : quand le patrimoine religieux rime avec un voyage insoupçonné
Par Éliane Trottier, le 22 juillet 2021
Au cœur de chacun de nos villages, on retrouve une constante, typique des paysages québécois : l’église. Aujourd’hui comme hier, elle est un signe qui ne ment pas sur la présence d’une communauté, d’un dynamisme local, d’un ancrage.
À l’intérieur, se cache tout un univers parfois insoupçonné. On y note les aspirations d’une époque, les drames d’une autre ou encore le génie de certains. Peu de réalisations architecturales peuvent aussi bien témoigner à la fois de la vie sociale et intime : lieu de rassemblement certes, les églises sont aussi des lieux de recueillement où, au fil des époques, les gens s’y sont réfugiés pour prendre un pas de recul sur leur bonheur ou leur malheur personnels. N’est-il pas émouvant de réfléchir aux générations précédentes qui se sont succédé sur ses bancs, chacune ayant ses rêves et ses défis? Pouvez-vous les ressentir, à travers le calme naturel des lieux?
Percevez-vous l’effet de leur trajectoire unique à travers le décor d’une église lorsque vous la parcourez? En plus des chefs-d’œuvre qui traduisent les ambitions d’alors, les œuvres plus modestes, comme les ex-voto, qui sont des offrandes de paroissiens à la suite d’une grâce obtenue, rendent compte du passage du temps et de l’évolution sociale.
La plupart des églises accueillent des œuvres d’art notables et présentent un effort d’ornementation tout aussi remarquable qui permettent d’accompagner cet état d’esprit, encouragé par l’aménagement de ces temples logés là où le village ou le quartier fourmille le plus. La visite d’une église vous transporte forcément hors du temps par son décor qui, soit par sa grande simplicité, soit par son exubérance affirmée, force l’admiration.
Dans Portneuf, cinq églises se distinguent par leurs qualités artistiques et architecturales. Regroupées sous le vocable des Voies du Sacré, elles sont des témoins privilégiés de la vie de leur village : Saint-Casimir, Grondines, Deschambault, Cap-Santé et Neuville. Chaque été, ces églises ouvrent leurs portes aux visiteurs, qu’il s’agisse de simples curieux sur la route, de férus de patrimoine religieux, ou d’explorateurs du dimanche en quête d’une pause.
À Saint-Casimir, l’église est un vaste temple dont l’envergure contraste avec l’ampleur du village actuel. Construite à la toute fin du XIXe siècle, elle est un exemple éloquent du dynamisme de son époque. Saviez-vous qu’il y a un siècle, Saint-Casimir prenait la forme d’une petite ville prospère, propulsée par l’essor industriel? Aujourd’hui, le temple représente l’un des legs les plus évidents de cette période intense, où tout semblait possible pour les Casimiriens. À l’intérieur, l’ornementation spectaculaire ne peut qu’impressionner!
La suite du parcours longe le Saint-Laurent, qui fait écho au patrimoine religieux portneuvois le plus ancien. L’église de Grondines témoigne bien de ce lien : pour répondre aux effets des marées millénaires du fleuve, les paroissiens ont entrepris de déménager le village plus loin dans les terres, délaissant la modeste église initiale de 1713, dont les vestiges demeurent visibles. La nouvelle église rend compte du faste religieux du XIXe siècle par son décor intérieur néoclassique équilibré et lumineux, jumelé à une ornementation néogothique extérieure et résolument distinctive.
Dans la même municipalité se trouve l’église de Deschambault, construite à la même époque. Nichée au cœur d’un noyau institutionnel remarquablement conservé, elle domine le Cap Lauzon. Difficile de résister à l’envie d’en franchir les portes lors d’une balade au village! À l’intérieur, les imposants jubés témoignent des foules qui s’y rassemblaient autrefois, mais facilitent aussi l’accès aux différentes œuvres qu’on y retrouve : statues, peintures et orgue sont des exemples de réalisations renommées dont on peut s’approcher de près.
Un peu plus à l’est, l’église Sainte-Famille de Cap-Santé est l’une des rares dont la construction a débuté sous le Régime français et qui subsistent. Au-delà de sa façade imposante, elle présente un décor riche et une ambiance feutrée par de magnifiques vitraux. Bonifiée au fil du temps, sa collection d’œuvres rend compte du grand talent d’artistes de la province tout en faisant preuve de cohérence. Surplombant également le Saint-Laurent, elle constitue un arrêt incontournable par son attractivité naturelle.
Enfin, le parcours se conclue ou débute, selon la direction que prennent vos pérégrinations, par l’église de Neuville. Elle loge un élément exceptionnel qui mérite d’être examiné sous toutes ses coutures : un baldaquin réalisé à la fin du XVIIe siècle, originellement destiné à la chapelle épiscopale de Québec. Ce véritable joyau du patrimoine religieux québécois participe à la formation d’un chœur d’église saisissant, vers lequel tous les regards se jettent. Récemment implantée dans cette église, la bibliothèque municipale laisse au chœur toute la place qui lui revient et offre de nouveaux prétextes pour l’apprécier.
Profitez des Voies du Sacré pour découvrir l’étendue des traditions artistiques et architecturales du Québec, dont même les formes les plus simples sont empreintes d’une certaine poésie, d’un rapport touchant au plus grand que soi. Une occasion rêvée de s’élever au-dessus du tumulte de la vie de nos villages, l’instant d’une visite. Ne tardez pas trop pour les visiter, car la plupart d’entre elles referment leurs portes au retour en classe des étudiants qui les animent, soit à la mi-août!
Les Voies du Sacré
Églises de Saint-Casimir, Grondines, Deschambault, Cap-Santé et Neuville
Du mercredi au dimanche, de 10 h à 17 h
23 juin au 15 août 2021